Impacts de l'ouverture d'un centre de dialyse au CH de Gonesse

florian.bayer@biomedecine.fr, cecile.couchoud@biomedecine.fr, mathilde.lassalle@biomedecine.fr

Contexte

Les professionnels de santé du CH de Gonesse constatent depuis plusieurs années une augmentation du nombre de malades IRCT non traités, arrivant notamment en service de réanimation. De plus, les malades du sud-est du Val-d'Oise traités en dialyse semblent disposer d'une offre de soins limitée. La plupart étant dialysés en Seine-Saint-Denis.

Ces impressions sont confirmées par plusieurs études, comme l'Atlas de l'insuffisance rénale chronique terminale en France [1]. Les cartes ci-dessous montrent une surreprésentation de la prélavence de l'IRCT traité dans cette zone.

[1] Le Neindre, C., Bricard, D., Sermet, C., Bayer, F., Couchoud, C., & Lassalle, M. (2018). Atlas de l'insuffisance rénale chronique terminale en France.

Une demande d'étude simulant l'implantation d'un centre de dialyse au CH de Gonesse a été adressée au registre REIN. Elle a reçu l’approbation de la cellule régionale REIN Île-de-France.

Prévalence de l'IRCT traité par greffe ou dialyse

Prévalence de l'IRCT traité par dialyse (lissage)

Objectifs

Mesurer les impacts théoriques de l'ouverture d'un centre de dialyse au CH de Gonesse sur :

  • les flux de malades
  • les transports

Méthodologie

Postulat : les malades qui verront leur temps de trajet réduit par l'ouverture d'un nouveau centre de dialyse s'y rendront

  1. Ajout d'un nouveau centre de dialyse au CH de Gonesse et calcul des temps d'accès au plus proche
  2. Les calculs sont faits pour chaque modalité
  3. Les malades dont le temps de trajet se voit améliorer sont alloués au centre de Gonesse
  4. Sinon, ils conservent leur centre de dialyse connu au 31/12/2020

Critères de sélection

  • Tous les patients dialysés au 31/12/2020 en autodialyse, UDM et dialyse en centre à proximité de Gonesse
  • Géolocalisation des centres de dialyse à l’adresse exacte. Filtre sur les centres de dialyse :
    • UDM et dialyse en centre >= 3 patients
    • Autodialyse >= 2 patients
  • Géolocalisation des patients à leurs communes de résidence ou adresse exacte si disponible
  • Utilisation des carreaux INSEE 200m 2017 pour la population des 65 ans ou plus

Données et outils

  • DIADEM
  • INSEE
  • BDROUTE IGN modifié avec le distancier de l'Agence de la biomédecine
  • Arcgis Network Analyst
  • Python (pandas, geopandas, aceso, scipy)

Localisation des centres de dialyse et de leur activité

Les cartes suivantes localisent les centres de dialyse de la zone d'étude, ainsi que leur activité au 31/12/2020. La zone d'étude couverte par la carte correspond à la zone potentielle d'attractivité d'un centre de dialyse au CH de Gonesse, en prenant en compte les centres limitrophes. Cette zone s'étend dans un rayon d'environ, 10 km autour du CH de Gonesse.

Les centres de dialyse les plus proches sont situés à Sarcelles, Stains, Saint-Denis, Drancy, Aulnay-sous-Bois et Tremblay-en-France. A noter que les simulations prennent en compte les flux sur l'ensemble de la région.

Les figures 1 à 3 montrent l'absence de centre de dialyse au nord de Gonesse. Par modalité :
  • 669 malades étaient dialysés en centre dans les centres de dialyse de la zone d'étude, dont 225 à Aulnay-sous-Bois (Fig1).
  • 298 malades étaient dialysés en UDM, essentiellement à l'ouest de la zone d'étude (Fig2).
  • 278 malades étaient dialysés en autodialyse, suivant un arc ouest sud-est (Fig3).

Population de 65 ans ou plus et localisation des malades dialysés dans la zone d'étude

Environ 155 000 habitants de 65 ans ou plus résident dans la zone d'étude pour 970 malades dialysés. Soit environ 62 dialysés pour 10 000 habitants de 65 ans ou plus. La répartition des dialysés est conforme à celle de la population, avec une forte polarisation sur la Seine-Saint-Denis (figures 4 et 5).

Gonesse comptait au 31/12/2020 23 malades dialysés (77.1 pour 10 000 habitants de plus de 65 ans) (figure 6).

Incidence des malades traités dans la zone d'étude

Le nombre de nouveaux malades dans la zone d'étude est de 250 en moyenne par année depuis 2006,suivant une progression linéaire. En cumulé, cela représente plus de 3700 malades traités entre 2006 et 2020 (Fig.7).

Simulations

Les cartes suivantes des flux réels de malades dialysés montre que l'hypothèse de proximité (les malades se rendent au centre le plus proche) peut-être validée dans le territoire du Val-d'Oise concerné par la zone d'étude. L'offre plus importante de centre de dialyse en Seine-Saint-Denis oblige cependant à relativiser cette hypothèse dans ce département.

Les simulations portent sur les trois types de modalités de dialyse en centre (centre, UDM et autodialyse). Seuls les malades concernés par chaque modalité sont pris en compte dans chaque simulation.

Nouvelle dialyse en centre

En simulant l'ajout d'une dialyse en centre à Gonesse :

  • Un potentiel de 42 malades y serait alloué (figure 9)
  • Venant essentiellement de l'Hôpital Privé Nord Parisien (25 malades, -21% de l'activité - figures 10)

Nouvelle UDM

En simulant l'ajout d'une UDM à Gonesse :

  • Un potentiel de 18 malades y serait alloué (figure 12)
  • Venant essentiellement de l'Hôpital Privé Nord Parisien (6 malades, -20% de l'activité - figures 13)

Nouvelle autodialyse

En simulant l'ajout d'une autodialyse à Gonesse :

  • Un potentiel de 31 malades y serait alloué (figure 15)
  • Venant essentiellement du centre d'autodialyse SIRTA d'Argenteuil (13 malades, -23% de l'activité) et l'Hôpital Privé Nord Parisien (-8 malades, -40% de l'activité - figure 16)

Impacts sur les temps de transport

En supposant que les malades les plus proches du CH de Gonesse s'y rendront, les médianes des temps de transport pour ces malades seraient réduites de :

  • 14 minutes pour la dialyse en centre (32 à 18 minutes - figure 15)
  • 8 minutes pour l'UDM (32 à 24 minutes - figure 16)
  • 22 minutes pour l'autodialyse (41 à 19 minutes - figure 17) et avec une forte réduction de l'interval interquartile (12 à 3,75 minutes)

Conclusion

L’implantation d’un nouveau centre de dialyse au CH de Gonesse permettrait, en se basant sur des cohortes historiques et en ne préjugeant pas de l'arrivée de nouveaux malades :

  • de redéployer environ 40 malades dans une unité de dialyse en centre
  • un peu moins de 20 malades dans une UDM
  • environ 30 malades dans une autodialyse
  • en faisant l'hypothèse que les malades se rendent au centre le plus proche.

Les temps d'accès médian de ses malades seraient raccourcis de 8 à 22 minutes en fonction des modalités. Ce qui réduirait également les km parcourus :

  • de 383 km pour les malades de la zone d'étude traités en dialyse en centre, soit une réduction des coûts de l'ordre de 119500 km par an (383 km *2(A/R) * 52 semaines * 3 séances par semaine), soit 3 fois la circonférence terrestre à l’équateur.
  • de 191 km pour les malades de la zone d'étude traités en UDM
  • de 633 km pour les malades de la zone d'étude traités en autodialyse (5 fois la circonférence terrestre à l'équateur)

L'impact sur l'activité des autres centres à proximité ne serait cependant pas négligeable, notamment pour l'Hôpital Privé Nord Parisien de Sarcelles (entre 8 et 25 malades en moins selon les modalités), de même que pour le centre d'autodialyse SIRTA d'Argenteuil (-13 malades). Néanmoins, la forte incidence dans la zone d'étude (+250 malades par an en moyenne) laisse supposer :

  • que les éventuels transferts entre centres seraient vite compensés.
  • qu'une majorité des malades déjà traités ne changeraient pas de centre dès l'éventuelle ouverture d'un centre de dialyse au CH de Gonesse.

Enfin, en termes de limites et perspectives, il convient de rappeler :

  • que cette étude se base sur un postulat de proximité qui est valable au niveau agrégé et non transposable à chaque individu.
  • Qu'elle donne une vision maximisée du potentiel de malades alloués au nouveau centre.
  • Un modèle prenant mieux en compte les aires d'attractions des centres, comme un modèle gravitaire, permettraient de mieux relativiser les résultats.